Allaitement : pourquoi (et comment) s’y préparer ?

Tu vas entendre plein d’avis et de retours d’expériences différents. C’est simple, c’est compliqué, il faut se former, il faut suivre son intuition, c’est magique, c’est contraignant, c’est pratique, cela peut provoquer des sensations intenses, c’est douloureux…

L’expérience de l’allaitement est différente pour chaque maman. Et une bonne préparation en amont peut tout changer ! Aujourd’hui, avec la perte des connaissances de toute une génération qui a peu allaité et des professionnel.le.s en maternité qui sont peu formé.e.s, allaiter peut être un véritable challenge. On peut se sentir très seule face aux difficultés. De nombreuses femmes découvrent que l’allaitement n’est pas toujours intuitif et qu’il nécessite un apprentissage. Surtout, en l’absence de modèles dans leur entourage. Heureusement, il existe de plus en plus de ressources accessibles en ligne et d’associations qui se mobilisent sur le sujet, comme l’incontournable La Leche League.

Le rôle du co-parent et des proches

Le soutien de ton co-parent, mais aussi des proches, est primordial dans cette aventure. L’allaitement peut être une expérience émotionnelle et physique intense. Cela peut parfois être déroutant, surtout lorsqu’il y a des difficultés.

Le co-parent a un rôle important à jouer, non seulement en t’aidant à faire face à ces défis, mais aussi en te soutenant dans tes choix. Parfois, face à la détresse de la maman, il peut sembler plus facile de donner du lait artificiel. Cependant, il est important de comprendre que le soutien émotionnel, logistique et pratique est ce qui permettra à l’allaitement de se mettre en place sereinement.

Pour accompagner la maman, il peut être utile de lui apporter un soutien concret au quotidien. Par exemple, gérer les tâches ménagères, préparer des repas rapides, faire le filtre avec l’extérieur… Le co-parent peut également être impliqué dans les moments de réconfort, comme le portage, le bain, ou les câlins, pour créer un lien fort avec le bébé sans passer par l’alimentation. Ce soutien permet de libérer l’espace mental et physique nécessaire à la maman pour se concentrer pleinement sur sa récupération et la mise en place de l’allaitement.

Comment bien se préparer à l’allaitement ?

La préparation à l’allaitement commence bien avant la naissance de ton bébé. Une lecture de livres, comme Le manuel très illustré de l’allaitement, peut t’offrir des clés pratiques. Mais ce n’est pas tout : arriver à la maternité informée et équipée est également essentiel. Cela comprend des informations sur la montée de lait, la gestion des engorgements, et les pics de croissance de ton bébé. Voici une checklist des indispensables de l’allaitement.

Un autre aspect de la préparation est la possibilité d’assister à des séances de préparation avec ton co-parent. Tu peux aussi rejoindre des groupes de soutien comme La Leche League (sur Facebook) ou d’autres groupes locaux. Ces ressources te permettront de rencontrer d’autres mamans, d’échanger des expériences et d’obtenir des conseils pratiques. Pour t’assurer d’être bien accompagnée, avoir les coordonnées d’une consultante en lactation expérimentée peut faire une grande différence en cas de difficulté.

La clé du succès de la mise en place de l’allaitement réside dans le peau à peau au maximum et de laisser ton bébé téter à volonté. Cette approche permet non seulement d’encourager la production de lait, mais aussi de renforcer les liens avec ton bébé. Malheureusement, certaines politiques de maternité insistent pour que le bébé reste couché dans son berceau, ce qui peut entraver la mise en place de l’allaitement. Heureusement, de plus en plus de maternités proposent des lits cododo, qui facilitent l’allaitement à la demande.

Les idées reçues et comment y répondre

Certaines idées reçues peuvent vraiment freiner ton projet d’allaitement, il est donc important de pouvoir les déconstruire.

• « Votre lait n’est pas assez nutritif » : Le lait maternel change de composition selon l’heure, l’âge et même le sexe du bébé, pour s’adapter à ses besoins. Aucune alternative ne peut être aussi adaptée pour un bébé en particulier.
• « Votre bébé a perdu trop de poids » : La perte de poids du bébé dans les premiers jours suivant l’enfantement est un phénomène normal et physiologique. Elle est principalement due à l’élimination du méconium et à une adaptation progressive à l’alimentation extra-utérine. Par ailleurs, en cas d’accouchement médicalisé, notamment par césarienne, le bébé naît avec un excès de liquide pulmonaire et interstitiel, qui est éliminé naturellement dans les premiers jours. Cela peut fausser l’évaluation initiale de sa perte de poids.
• « Vous n’avez pas assez de lait » : Les compléments proposés en maternité sont souvent contre-productifs pour lancer la lactation (tu peux les refuser). Ils servent surtout à rassurer le personnel de la maternité, pour une reprise de poids rapide avant la sortie. Si le bébé est au sein à la demande, en peau à peau le plus possible, et qu’il n’a pas de problème de succion, la production de lait augmente selon ses besoins.
• « Vous ne savez pas allaiter » : Il y a autant de façons d’allaiter que de mamans et bébés. Il existe néanmoins des freins physiques qui peuvent rendre l’allaitement douloureux (freins restrictifs, RGO, REF…) et que beaucoup de professionnel.le.s en maternité ne savent pas diagnostiquer. Un tire-lait électrique peut être utile dès le début, le temps d’avoir un rendez-vous avec une personne formée qui pourra t’aider.
• « Vous êtes trop émotive, trop fatiguée, trop… » ou « Vous voyez bien que votre bébé a faim » : La montée de lait est un moment intense physiquement et émotionnellement. On l’appelle souvent la nuit de la java, où plus rien ne va. C’est déroutant mais c’est normal. Ton bébé n’est pas en détresse, il stimule la montée de lait, c’est son travail à lui. Ta lactation s’ajuste rapidement à sa demande. Certaines mamans peuvent aussi ressentir une vague d’émotions négatives, comme de l’irritabilité, de l’angoisse ou de la tristesse, juste avant l’éjection du lait. C’est ce qu’on appelle le réflexe d’éjection dysphorique (RED). Ce phénomène rare est tout à fait normal, bien qu’il puisse être perturbant. Si tu ressens cela, sache que tu n’es pas seule. En parler avec une consultante en lactation ou d’autres mamans ayant vécu la même chose peut être très utile pour te soutenir.
• « Le biberon permettra à papa d’être utile, de se connecter au bébé » : Un co-parent peut tout à fait tisser un lien fort avec son bébé autrement : portage, bain, peau à peau, bercements, câlins… Autant de moments essentiels pour créer une connexion, sans passer par l’alimentation.
• « Votre bébé est trop grand, il faut le sevrer ! » : L’allaitement long est physiologique : les études anthropologiques semblent indiquer que l’âge « naturel » pour le sevrage se situe entre 2 et 6 ans. Bien entendu, un bébé peut se sevrer seul plus tôt. L’Organisation Mondiale de la Santé recommande un allaitement jusqu’à au moins 2 ans, en complément d’une alimentation diversifiée.

Les bénéfices de l’allaitement pour la santé de l’enfant

L’OMS recommande un allaitement exclusif jusqu’à six mois et au moins jusqu’aux deux ans de l’enfant. Les bienfaits sont nombreux :

• Réduction des infections gastro-intestinales et des diarrhées.
• Digestion facilitée et diminution des coliques.
• Moins d’otites infectieuses avant deux ans.
• Diminution des affections respiratoires et des risques de mort subite du nourrisson.
• Réduction des risques d’entérocolite ulcéro-nécrosante chez les bébés prématurés.
• Potentiel effet protecteur contre l’asthme et certaines allergies.
• Études en cours sur un éventuel impact sur le surpoids et le quotient intellectuel.

En application locale, le lait maternel a aussi des propriétés cicatrisantes, hydratantes et antibactériennes, utiles pour les plaies, boutons, conjonctivites ou encore nez bouché.

Les bénéfices de l’allaitement pour la santé de la mère

L’allaitement n’est pas seulement bénéfique pour le bébé, il l’est aussi pour la maman. Il aide à réduire les risques d’infections post-partum, favorise une récupération plus rapide, et diminue les risques de cancers du sein et de l’ovaire. En outre, contrairement à ce que l’on pourrait croire, même si tu te réveilles la nuit pour allaiter, de nombreuses mamans trouvent que leur sommeil reste plus réparateur grâce à l’impact physiologique de l’allaitement.

Le lien que tu crées avec ton bébé pendant l’allaitement peut renforcer ton sentiment de confiance et de bien-être. C’est un acte nourrissant à bien des niveaux, pas seulement pour ton bébé mais aussi pour toi en tant que maman.

L’impact de certaines substances sur l’allaitement

Certaines substances peuvent influencer l’allaitement, mais il est important de les aborder de manière nuancée. Voici les dernières données scientifiques sur le sujet :

• Tabac : L’allaitement reste plus bénéfique que les risques du tabac. Il est recommandé d’arrêter de fumer. Si ce n’est pas possible, de réduire et de fumer après la tétée pour limiter l’exposition à la nicotine.
• Alcool : L’alcool passe dans le lait en faible quantité. Bien entendu, il faut être vigilant et consommer l’alcool de manière responsable. Il est tout à fait possible pour une maman de boire un verre de vin à un repas. Et cela même si elle met son bébé au sein immédiatement après sa consommation.
• Caféine et théine : Ces substances passent dans le lait et peuvent affecter le bébé. Il est donc conseillé de limiter leur consommation.
• Autres drogues : Les plupart des drogues se retrouvent en grande quantité dans le lait. De ce fait, il s’agit d’un des rares cas où l’allaitement est à déconseiller.
• Médicaments : De nombreux médicaments sont compatibles avec l’allaitement. Il est recommandé de consulter des ressources fiables comme le site du CRAT pour connaître les médicaments sécuritaires.

Et si ça ne marche pas ?

L’allaitement peut parfois être semé d’embûches. Malgré toute la préparation, certaines mamans rencontrent des difficultés qui les amènent à chercher des alternatives. Cependant, il est important de savoir que les préparations commerciales pour nourrisson ne sont pas toujours la seule option.

• Le don de lait : Dans certaines cultures et époques, il était courant de faire appel à des mères allaitantes de l’entourage pour nourrir un bébé qui ne pouvait pas être allaité par sa propre mère. Aujourd’hui, les lactariums existent pour les bébés prématurés. Pourquoi ne pas envisager un partage au sein de son cercle proche ? Certaines mamans peuvent être prêtes à donner un peu de leur lait pour aider un bébé dans les premières semaines.
• Les alternatives maison : La fondation Weston A. Price a développé des recettes maison inspirées de préparations traditionnelles à base d’ingrédients naturels et nutritifs. Elles demandent un certain investissement en temps. Néanmoins, elles constituent une piste à explorer pour les parents soucieux de proposer une alternative plus adaptée aux besoins physiologiques du bébé.

Si l’allaitement ne se passe pas comme prévu, il est essentiel de se rappeler que chaque situation est unique. L’important est de trouver une solution qui convient à ton bébé et à toi, sans culpabilité.

En conclusion

L’allaitement, bien que parfois perçu comme un défi, est une aventure unique qui apporte de nombreux bienfaits pour toi et ton bébé. Chaque étape, même les plus difficiles, fait partie de cette belle expérience. Avec la bonne préparation, le soutien de ton entourage et des ressources adaptées, tu peux surmonter les obstacles et vivre pleinement ton projet d’allaitement. Souviens-toi, il n’y a pas de méthode universelle. L’essentiel est d’écouter ton corps, tes envies et de t’entourer de personnes bienveillantes. Peu importe les défis, tu n’es pas seule dans ce parcours et il existe toujours une solution pour t’accompagner. Que ton projet d’allaitement dure quelques mois ou plus longtemps, chaque moment est précieux. Tu es capable de t’adapter et de donner à ton bébé ce qui est le mieux pour vous deux.

Et toi, comment as-tu vécu ou prépares-tu ton allaitement ? Dis-moi en commentaire !

Sources :

• Fondation Weston A. Price
• Formation En Terre de Mères
• Et le sevrage, comment ça se passe ?, La Leche League
• Eidelman et al, Breastfeeding and the Use of Human Milk (2012)
• Nafstad P et al., Breastfeeding, maternal smoking and lower respiratory tract infections, Eur Respir (1996)
• Woodward A et al., Acute respiratory illness in Adelaide children : breastfeeding modifies the effect of passive smoking, J Epidemiol Comm Health (1990)
• Victora CG et al. Breastfeeding in the 21st century:epidemiology, mechanisms, and longlife effect. Lancet (2016)
• Hauck et al. Breastfeeding and reduced risk of sudden infant death syndrome: a meta-analysis (2010)

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Photo : Luiza Braun / Unsplash

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